19/06/2015

La dispersion programmée

Avoir plusieurs cordes à son arc, dit l'adage si sage, comme j'aimerais n'en avoir qu'une, et viser juste.

09/06/2015

En revenant de Saint-Malo

Des casquettes de marin, des chaussures Bateau et des marinières, me voilà arrivée à Saint-Malo.
Une première journée sans avoir vu l'océan, ça ne fait rien, je verrais un peu plus loin.

Voici quelques polaroids à la volée du Festival Étonnants Voyageurs 2015.

Prix Nicolas Bouvier remis à Paolo Rumiz pour son livre Le Phare, voyage immobile (Hoebeke, 2015).
L'interviewer : "On ne voyage jamais qu'avec soi-même."
Paolo Rumiz : "On ne sort pas indemne d'un phare. [...] Le silence a amplifié mes sentiments et a éclairci des choses qui n'étaient pas claires en ville, chez moi. [...] Il faut écrire avec les pieds, car il faut voir le monde. [...] Je n'ai pas dit le nom de ce phare, car je voulais le protéger de l'invasion des barbares."
Gilles Lapouge à propos du livre : "C'est un livre littéraire." ~ Aie de le dire ! ~

~ L'encre VS l'ancre ~

Et cette phrase de Segalen qui résonnait fort dans la salle : "On fit comme toujours un voyage au loin de ce qui n'était qu'un voyage au fond de soi."

Gilles Lapouge (qui affirme détester voyager, mais qui explique partir de tant à d'autres parce qu'il s'ennuie beaucoup en voyage et que l'ennui le pousse à écrire) résume ainsi le voyage : "On se retrouve tout nu, sans identité, dans un endroit problématique."

Pour saluer Jacques Lacarrière. 
Pascal Dibie : "On peut faire le tour du monde, si on n'est pas voyageur, on verra rien."

Hommage à Jean Métellus.
Le chapeau de Bruno Doucey occupe un fauteuil au même titre que le chien de Drucker.

La chanson la chanson
Jean Rouaud à cour qui chante un blues avec la guitare à grande bouche de Thierry Robin, c'est étrange, un blues manouche, c'est étrange, un écrivain qui chante avec dans la voix de légers accidents de sortie de route à la Elvis (sauf que chez Elvis ça n'avait rien d'un accident). Un écrivain qui chante peut ne pas être un chanteur. Un écrivain qui chante peut ne pas être un auteur de chansons. Thierry Robin à jardin statufié. Sa guitare pourrait bien lui crier de la reprendre...

Trois voix de femmes (selon l'intitulé de la rencontre, parce que trois voix d'hommes, ça ne se dit pas)
Habiba Djahnine (Fragments de la maison, Bruno Doucey, 2015) : "Je parle la langue française de manière algérienne."
Joséphine Bacon (Nous sommes tous des sauvages, Mémoire d'encrier, 2014) : "Quand tu es nomade, tu n'as pas besoin de savoir écrire ni compter, tu as juste besoin d'un bâton à messages." Elle explique le système du bâton planté au sol qui donne des nouvelles des familles déjà parties. "Je vous raconte un peu nous, dit-elle un peu gênée."
Valérie Rouzeau (Va Où, La table ronde, 2015), qui préfère lire ses poèmes et écouter ceux des autres que de tenter d'expliquer son écriture : "Je ne veux pas faire l'exégèse de moi-même."

Mondes magiques
Le citronnier et la fougue de Miguel Bonnefoy qui récolte des applaudissements pour la cavalcade maîtrisée de sa réponse. (Le Voyage d'Octavio, Rivages, 2015)

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La mode n'épargnant pas le langage, les mots verticalité et quête ont remporté ex-æquo le prix du mot le plus employé du festival 2015. Désormais, le voyage se doit d'être vertical, intime, historique, tout sauf géographique, ce qui serait d'une banalité consternante...


Extrait d'une lecture qui a laissé l'auditoire chaud, quelque peu humide, et flottant :

tu ne me regardes pas
tu ne me vois pas
tu ne m’entends pas
tu ne m’écoutes pas
tu ne me parles pas
tu es ici en conquérant de ma Terre
tu m’emprisonnes dans ma Terre
tu me prives de mon identité
tu me prives de mon territoire
tu m’enchaînes dans des réserves que tu as créées
tu veux être maître de mon esprit
qui suis-je ?
tu ne me connais pas
tu m’appelles : Montagnais
tu m’appelles : Cri
tu m’appelles : Tête de boule
tu m’appelles : Algonquin
tu m’appelles : Naskapi
tu m’appelles : Abénaki
tu m’appelles : Micmac
tu m’appelles : Huron
tu m’appelles : Iroquois
tu ne connais pas mes légendes
tu ne connais pas mon histoire
n’attends pas que je me fâche telle une tornade
n’attends pas que je me libère de mes chaînes

Joséphine Bacon, Nous sommes tous des sauvages, Mémoire d’encrier, 2014

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Mais pourquoi vous n'enregistrez pas au lieu d'écrire ce qui se dit ? Il m'est encore impossible d'enregistrer mes pensées...